L’église Saint Pierre d’Arrancourt pendant la révolution ou chronique d’une mort annoncée.
On ne connait pas la date de construction de l’église St Pierre, mais étant de style roman elle serait antérieure au XIII siècle.
Les registres de 1690 sont les seuls témoins tardifs de son existence. Nous avons la chance par rapport à nos voisins de détenir le premier registre des réunions du conseil à la création en 1790 de la commune d’Arrancourt. Ce registre reste le témoin d’une agonie qui durera 135 ans.
Paroisse de part son église, le village se voit érigé en commune à la révolution, sans église nous serions certainement aujourd’hui des Abbevillois. Seul les villages ou hameaux (Fontenette, Bois-Champbault) ne détenant pas d’église sont attachés aux paroisses et plus tard aux communes).
Le 14 novembre 1793, le maire, officiers municipaux et autres habitants sont rassemblés au son de la cloche en la maison du culte ou étaient présent deux commissaires nommés par le représentant du peuple de la ville d’Etampes, pour enlever dans l’église, dite maison du culte, tous l’or et l’argenterie de vase sacré, de cuivre…la liste des objets du culte est longue… ils ont emporté toute l’argenterie et nous ont laissé tout le reste pour le conduire demain au district d’Etampes.
Ce même jour d’après l’ordonnance des dits députés commissaires, nous avons requéri les habitants pour desceller les vingt huit grandes barres et vingt trois petites barres de fer qui estoit posé tout aux croisée de la dite église qu’à la sacristie … affaiblissant la structure du bâtiment…les grilles du cimetière et aussi descellé la croix de fer qui était au dit cimetière …à l'exception de la croix de fer et du coq en cuivre qui est sur la flèche du clocher, dont personne n'ayant accepté à risquer sa vie pour l'aller l'ôter.
L’église devenue salle communale verra au son de la cloche se réunir le conseil et la population plusieurs fois par semaine pour lire les décrets édités par la convention, décrets affichés sur la porte et couchés sur le registre. Sous l’Empire, ces réunions populaires devront cohabiter avec les cérémonies du culte au grand dam du curé revenu dans les murs.
En 1806 la commune manquant de moyen, le maire demande au maçon Jean LouisMinier de lui évaluer la valeur de l’église, celui-ci dans son estimation écrie :
Primo La croix de fer et le coq de cuivre de dessus le clocher, Mr le maire et tous les habitants de la commune m’ont prié de ne pas les comprendre dessus que dans le cas ou on voudrait vendre l’église que l’on voulu bien leur laisser pour placer sur un pilier dans un endroit qui se propose
Secundo L’ardoise qui couvre le Clocher estimé à vingt francs
Tertio La tuile qui couvre l’église la sacristie et le chapiteau estimés ensemble à trois cent vingt francs
Quarto Le carreau de l’église et de sa sacristie estimé à vingt francs
Cinto Tous les bois de charpente …………
Mais la destruction du bâtiment ne se fera pas, et en 1810 lorsque le sous préfet demande à la commune de participer aux réparations de l’église de St Cyr, le maire refuse : nous ne voulons pas aller à St Cyr au culte par rapport au trop grand éloignement et les chemins impraticables, mais l’année suivante le sous-préfet enfonce le clou en demandant la vente et destruction des églises et cimetières de Fontaine la Rivière et Arrancourt (demande du maire de St Cyr). Louis Georges Benoist maire élu en 1800 (il le restera prés de 40 ans) celui même qui préconisa la vente 4 ans plus tôt, répond au sous-préfet dans une longue lettre argumenté et poignante : Notre église et notre cimetière nous sont très nécessaires et très précieux, notre église a compté beaucoup à nos pères et à nous et nous avons toujours fait jusqu'à l’année derniére toutes les réparations à nos frais (pieu mensonge)…l’église d’arrancourt est si bien batise et si bien vousté ( que à moins que l’on la fasse démolir) il n’y a pas d’homme sur terre qui la verra périr….notre église nous est d’un grand azil parce que si le feu ou l’eau venaient à détruire quelque maison comme il est arrivé l’année dernière à Abbeville elle servirai d’azil aux malheureux infortunés…Elle nous sert de maison commune pour y tenir nos séances, faire nos délibérations, pour y déposer toutes les réquisitions en grains et fourrages lorsque les troupes passe par Angerville. L’église St Pierre sera une nouvelle fois sauvée pour plusieurs décennies. L’église de Fontaine la Rivière n’aura pas cette chance.
Une nuit d’hiver 1827 à 3 h du matin le bourg est réveillé dans un grand bruit Le clocher de l’église s’est écroulé comme menaçant ruine depuis plusieurs années… du coté du cimetière couvrant la partie du carrefour, sur le moment le maire requis les habitants de donner aide et secours pour empiler les bois de crainte qu’il soit dérobé…on a transporté la cloche chez le sieur P… . Par chance la cloche dans sa chute ne sera pas fendue. Cette cloche prénommée « Louise » baptisée en 1735 et un des rares vestiges de l’église avec peut-être une statue polychrome de St Pierre retrouvée dans le clocher de l’église d’Abbeville et les fonts baptismaux se trouvant sur le terrain d’un particulier d’Abbeville.